Atelier « Etat Plateforme » : Le numérique vu sous l’angle anthropologique

Nous connaissons tous ce dessin où l’on voit l’Homme qui petit à petit se redresse se met à porter des outils et puis qui se retrouve finalement derrière un ordinateur. Il y passe toutes ses journées au point de devenir lui-même un ordinateur ou être dépassé par les machines. Cette vision est inspirée de la science-fiction née au 20e siècle. Mais elle vit ces dernières décennies car elle ne correspond pas aux attentes profondes de la population. Voici pourquoi.

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Dans son évolution les hominidés ce sont distinguer des autres mammifères par leur extraordinaire capacité à s’organiser entre eux pour développer des stratégies et des projets complexes. Certes les castors sont capables de se mettre à plusieurs pour construire un habitat solide mais force est de constater que les hommes sont capables de s’organiser pour construire des gratte-ciel.

Pour les historiens et les anthropologues il y a changement de civilisation lorsque 3 paramètres de notre vivre ensemble sont modifiés : l’énergie, les modes de communication et la remise en cause d’un ou plusieurs textes fondamentaux.

Pour ce qui nous concerne l’énergie et des modes de communication, l’évolution qui s’impose converge vers la notion de structure organique et cette évolution va structurer le nouveau modèle de société.

Pour ce qui concerne le texte fondamental il s’agit notamment des premiers versets du livre de la Genèse dans lequel Dieu dit à l’homme : « tu trouveras dans la nature tout ce dont tu as besoin ». L’homme n’avait pas pensé qu’il y avait des limites à ce pillage et ce pillage a pris une forme anxiogène qui donne l’impression d’un suicide collectif potentiel. C’est cette perspective qui le mobilise en faveur d’un changement profond.

Aussi loin que nous parvenons à comprendre comment ont vécu nos aînés, nous constatons que la société des hommes a commencé par une forme matrilinéaire. C’est-à-dire que la préoccupation prioritaire était la reproduction et l’amélioration de l’espèce. La pulsion de vie dominait l’organisation des tribus.

Puis l’homme s’est mis à construire des outils et a tenté de domestiquer la nature il s’est mis à posséder des objets puis de terre et sa préoccupation a été réorientée vers la notion de possession et par extension de compétitivité : posséder plus que l’autre, s’approprier le bien de l’autre, exister en tuant où en écrasant les autres… La pulsion de mort s’est mise à prendre une place visible dans la société. Cette population était exposée aux caprices de la nature. Elle s’est protégée psychologiquement vénérant des divinités.

Puis petit à petit l’homme est devenu agriculteur il a conservé la structure patriarcale de sa société la pulsion de mort mais sa priorité s’est centrée sur le besoin de préserver la terre et en conquérir d’autres. Il a adopté une structure pyramidale qui permet de mobiliser rapidement beaucoup d’énergie humaine. Il a commencé également à structurer sa spiritualité en allant progressivement vers le monothéisme.

Puis est apparue l’industrie avec sa promesse du « bien-être pour tous grâce au progrès technique ». Cette époque conserve la structure patriarcale et les organisations pyramidales et, indirectement, le poids de la pulsion de mort comme le montrent les guerres de plus en plus technologiques, d’une puissance effroyable, éloignée de la nature et proche de la matérialité. La population s’éloigne une spiritualité et se laisse piloter par l’importance de l’argent.

À présent ce modèle montre ses limites matérielles et spirituelles. L’homme à travers ses progrès comprend qu’il fait partie intégrante du cosmos et de ses lois, plus extraordinaire que prévu. Il comprend aussi qu’il doit composer avec la nature et son environnement. Il se tourne progressivement vers une gouvernance « organique », plus à même de lui permettre de s’adapter à son environnement. Il se met à comprendre que la richesse vient désormais du savoir et de la manière de le faire fructifier.

C’est donc un nouveau modèle de société qui émerge basée sur une organisation organique et donc collaborative, fortement adossée à la technologie de traitement de l’information sous toutes ses formes. Cette technologie multiforme joue un rôle central puisque la forme de gouvernance qu’elle permet repose sur la capacité à échanger les bonnes données au bon moment avec les bonnes personnes qui dispose des bonnes capacités d’action : elle rend l’homme adaptable et réactif, ce qui caractérise les espèces attachées à leur pérennité.

Ainsi, nous nous trouvons en présence de citoyens qui formulent de nouvelles exigences : ils ne renoncent pas aux progrès apportés par l’ère industrielle, mais ils entendent mettre ces progrès en concordance avec l’environnement. Au-delà du bien-être matériel, ils entendent accéder à l’« estime de soi » (au sens de la pyramide de Maslow). Cette estime de soi, ils vont la trouver dans les tâches contributives (soin de ses proches, partage du savoir, développement de la démocratie, réappropriation d’une forme de spiritualité…) mais aussi dans les tâches apathiques (résolution de conflits sanitaires, sociaux, économiques…) repensées dans un espace non marchand dans lequel il va être possible d’investir le temps libéré par le numérique (robots, IA, Big data…).

C’est donc dans ce contexte profondément mouvant que l’État a la possibilité et sans doute même le besoin de se repenser et de s’équiper en conséquence.

Le modèle dominant actuelle des GAFA ne répond pas à cette structure. Une autre structure et donc à imaginer. L’Europe coins de la planète où les pays on était contraint depuis plus de 50 ans à ne pas se faire la guerre commence à se tourner vers une structure de relation basée sur le modèle gagnant-gagnant à la possibilité d’imaginer l’environnement technologique qui correspond à cette nouvelle vision du monde et de sa gouvernance.

Rendez-vous le 12 mars pour la prochaine réunion de l'Atelier >

 

Auteur: 
Geneviève Bouché, Présidente de l'Atelier "Etat Plateforme" de Forum ATENA

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