Google et la suprématie quantique

Le site de la NASA vient d'héberger un court instant une publication de Google datée d’aout 2019 annonçant l’exécution d’un calcul sur ordinateur quantique qu’une machine classique ne saurait mener. Bref, la suprématie quantique.

La publication a presqu’aussitôt disparu (oups ?) mais le Financial Time a eu le temps de la repérer. On peut encore en trouver des traces dont la lecture est instructive mais pas aisée.

Les résultats sont impressionnants.

Qu’en est-il ?

Le mythe de la « suprématie quantique » ne fait pas l’unanimité chez les chercheurs pour qui l’expression est accrocheuse et exagérée. Elle sera déclarée dès qu’un calcul sera plus rapide en quantique qu’en classique. Dit autrement il y a de fait une « suprématie classique » sur toutes les applications et on en cherche UNE qui permettrait de parler de suprématie quantique. Le terme de suprématie est bien galvaudé.

L’application utilisée par Google, d’après ce que j’ai pu déchiffrer, porte les calculs de distribution de probabilités de chaines de bits issus d’un circuit pseudo aléatoire. Un million d’échantillons sur une instance consommeraient deux cents secondes avec un calculateur de 53 qubits, contre dix mille ans évalués sur un calculateur classique. Il n’y a pas photo.

Notons que de base, la quantité de qubits devait être 72, mais l’intrication d’autant de qubits s’est révélée par trop délicate. Pour un regard plus complet sur la technique, je vous engage à vous reporter à l’excellent article d’Olivier Ezratti.

Sans remettre en doute l’efficacité du calculateur quantique, j’aurais souhaité en savoir plus sur la manière d’évaluer le temps mis par le calculateur classique. Par exemple, l’application sans précaution d’un algorithme adapté à une machine quantique sur une machine classique aboutit à des aberrations. Des précisions sur le calcul auraient été les bienvenues.

Le terme de suprématie n’est-il pas démesuré avec une technologie pour qui découvrir que 21 = 3 x 7 est une performance ?

Par ailleurs le calculateur quantique est dédié à cette application particulière. Il ne sait faire que ça, ainsi que précisé dans le papier :  "The system can only perform a single, highly technical calculation, according to the researchers, and the use of quantum machines to solve practical problems is still years away."

On s’émerveille de pouvoir faire cohabiter une cinquantaine de qubits alors que des millions sont requis pour faire trembler la cryptographie. Il y a encore du boulot.

Qu’en penser ?

Que ces vifs propos ne douchent pas votre enthousiasme pour les technologies quantiques ! Ils visent juste à modérer une compétition artificielle attisée par le racoleur terme « suprématie » : calculateurs quantiques et classiques ne font pas le même métier. Je ne serais pas étonné de résultats spectaculaires dans le domaine de la simulation par exemple.

 

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Auteur: 
Jacques Baudron - Secrétaire Forum ATENA - septembre 2019 - jacques.baudron@ixtel.fr

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